mardi 27 août 2013

Top of the lake, au bord de soi et du monde


Top of the lake est une mini-série de 7 épisodes de Jane Campion et Gerard Lee.
L’intrigue policière se déroule autour d’un lac de montagne, à Laketop, au sud de la Nouvelle Zélande. Une petite fille, Tui Mitcham, 12 ans, tombe enceinte. L'inspectrice Robin Griffin, revenue dans sa ville natale, enquête sur ce probable viol quand la fillette disparait.
Une succession d’autres personnages sont intégrés à l’intrigue : Matt Mitcham, le père de Tui, Johnno, l’ex-fiancé de Robin, l’étrange GJ, gourou du camp de femme qui vient de s’installer à « Paradise » au bord du lac, Al Parker, le chef de la police locale … L’ensemble de ces protagonistes, rattachés les uns avec les autres par des liens de voisinage, de parenté, des évènements passés, impliqués de près ou de loin dans l’enquête, évoluent en vase clos dans cette zone isolée où tout le monde se connait.

L’élément qui unit aussi chacun de ces personnages, c’est le lac, avec lequel chacun d’entre eux entretient une affection, se renvoie à un souvenir tragique ou réconfortant : le père de Robin s’y est noyé, Matt Mitcham y veille le corps enterré de sa mère, Tui s’immerge dans l’eau du lac au début de l’intrigue comme pour se laver du viol qui a sans doute été commis … Le lac est successivement un composant symbolique de l’intrigue, un refuge protecteur, une terre ancestrale, une abîme dangereuse. Comme une présence immuable et latente, il veille ou menace ses habitants, anime et articule le récit de chacun.

Il est aussi un espace matérialisé, un lien physique entre les personnages qui évoluent autour, dessus et à l’intérieur de lui, habitent sur ses bords, y pêchent, s’y déplacent en bateau, s’y lavent, s’y baignent, s’y noient.

Il apparaît donc de manière récurrente dans les séquences du film et sous des angles différents : en arrière-plan, en vue aérienne ou au premier plan.

Présenté en arrière-plan, il apparaît comme un repère qui resitue systématiquement l’intrigue.


Le lac apparaît parfois en vue aérienne ou en plan large, notamment lors des recherches menées en hélico pour trouver la fillette, ce type de séquence met à distance du lieu et de l’intrigue, les relativise, renforce la contingence du récit ou des personnages pour magnifier la beauté naturelle, la majesté, l’immuabilité du paysage. Le site apparait ainsi dans son intemporalité.


A l’inverse le lac peut être présenté au premier plan ou comme un élément principal de la scène, il devient alors un élément expressif à part entière de la narration qui rapproche le spectateur de l’intrigue, l’inscrit dans l’intimité, la complexité, l’épaisseur des personnages. Il apparaît avec différentes matérialités, différents visages qui interagissent avec le récit, l’accompagne ou le façonne : l’eau épaisse et noire, l’eau reflétant, l’eau agitée, l’eau clair et vive, l’eau trouble, l’eau-brume, l’eau-larme … Le lac témoigne d’un instant donné, d’un état de lui-même et des personnages.


Le lac est ainsi le point à partir duquel l’intrigue est zoomée ou mise à distance, renvoyant le récit particulier à une histoire plus universelle. Il apparaît successivement comme une réalité physique temporaire, fragile et expressive ou comme une immuable représentation du monde.

Texte de
















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